mardi 2 décembre 2008

épisode quarante-six

- Tu veux dire qu’ils ne peuvent pas se déplacer comme nous ??? Enfin, ils pourraient mais ils n’en ont pas besoin ? Les pages noircies suffisent à les faire vivre, je ne comprends pas trop. Un livre de pages blanches serait comme nous, alors qu’un livre écrit par un humain n’aurait pas la même nature ???
- Voilà, c’est ça ! Exactement… Si l’homme laisse une quelconque empreinte artistique sur un objet, que ce dernier soit dessiné, écrit, sculpté en réponse à l’essence ou à la souffrance de l’homme, ça lui suffit: il n’a pas besoin d’exister, de bouger autrement. Sa nature artistique suffit… Mais c’est encore plus complexe car tout objet, même le plus utile, peut être fabriqué par une volonté artistique. Si une chaise est fabriquée comme l’écho d’une souffrance humaine, elle en devient une œuvre d’art… De même que le livre ou le tableau qui est fait selon une démarche non artistique –ce qui est souvent arrivé ces derniers temps – eh bien celui-ci a la même nature que nous, il peut bouger, communiquer, il a une âme indépendante…
- Tu veux dire que celui ou celle qui m’a crée n’avait pas une démarche artistique ???
- Et non, mon gars ! Comme moi d’ailleurs… Comme la plupart des objets utiles. Nous sommes crées pour être consommés puis, un jour ou l’autre, jetés. D’autres chapeaux et d’autres caramels ont pu être de véritables œuvres d’art. Mais je te parle d’un temps que tu ne peux connaître… Tu ne peux pas savoir la jalousie que j’ai éprouvée envers ces livres lorsque je les lisais par-dessus l’épaule de mon propriétaire ! J’aurais donné n’importe quoi, j’aurais fait l’impossible pour être une œuvre d’art. Malheureusement je n’ai jamais pu!

Le chapeau poussa alors un profond soupir, différent mais aussi désespéré que peut l’être celui d’un humain. Le caramel ingurgitait encore une révélation brutale: il n’était pas une œuvre d’art.

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