jeudi 28 août 2008

épisode trente-deux

Le chapeau frémit, avant de bondir vers un premier rocher, sur lequel il se posa en douceur.
- Voilà. Tu vois ! Rien de plus simple !!!
Le caramel le rejoint aussitôt, d’un bond encore plus rapide.
- Ouf… Ca fait bizarre ! C’est facile en fait…
- Je te l’avais dit !!! On continue !!! A ce rythme, on y sera surement avant la nuit ! On se lance, si tu fatigues tu me le dis !

Et, comme des chèvres des plages, les aventuriers s’avancèrent en bondissant, on les aurait crus montés sur des ressorts. Le caramel s’en donnait à cœur joie. Il adorait cette sensation, bien plus que celle du vol plané. Il bondissait de plus en plus haut, dépassant en hauteur les bonds du chapeau. Il sautait si haut qu’il se crût un instant un oiseau. Si bien que le chapeau dût le rappeler à l’ordre.
- Eh ! Oh ! Faut pas s’emballer non plus! Ne saute pas si haut, tu risques de te faire emporter, et de nous faire remarquer…
- T’as vu ça un peu ? Regarde!!!

Le caramel fit un bond de quelques mètres, avant de retomber à côté du chapeau…
- C’est terrible ! Je saute super haut !!!
- Bravo, ô supercaramel, tu m’épates… Mais restons discrets, et garde ton énergie pour plus tard ! On continue, tu me fais signe si tu sens que tu fatigues, on fera une pause.

Il n’osait pas trop dire, mais ces bonds le surprenaient, il n’avait jamais vu un objet faire ça. Il préférait ne pas trop complimenter le caramel pour l’instant.
Ils avancèrent sans problème, de rocher en rocher, jusqu’à la moitié du chemin. Ils s’éloignaient de leur plage, pleins d’un espoir un peu fragile. Le vent soufflait plus, les remous des vagues s’intensifiaient.

Le chapeau dut prendre sur lui et ravaler sa fierté pour avouer, à la moitié du chemin, qu’il voulait faire une pause : il avait un léger vertige… Ils s’arrêtèrent donc, sur un rocher aplani qui dominait les autres. Le caramel, lui, était en pleine forme, il était prêt à aller au bout du monde à coup de bonds sur les rochers…

lundi 25 août 2008

épisode trente et un

- Mais c’est loin !!!
- Oh, j’ai vu que tu savais faire des bonds surprenants pour ton âge et ta nature. Tu ne vas pas me faire croire que tu n’es pas capable de sauter sur un si petit rocher !!!
- Ben, c’est vrai que je saute haut, mais je ne sais pas à quoi c’est du, je n’ai jamais compris.
- Eh bien, même si tu ne comprends pas, profite de ce don et ne nous fais pas ton cinéma quand je te demande de faire un petit bond de rien du tout !!!
- « nous, nous »… c’est qui, nous ? Tu fais un délire mégalo ???
- Et allez ! On gaspille de l’énergie à s’engueuler comme si on n’avait rien d’autre à faire… Oui, je suis mégalo, je suis ce que tu veux du moment que tu acceptes de faire ce satané bond pour qu’on monte enfin sur cette satanée pierre qui doit bien rire de nos stupides disputes !!!
- C’est bon, c’est bon. Je me concentre, on va y aller, on reste zen… on profite du calme, des vagues, du carpe diem…
- Ne te fous pas trop de moi non plus !
- Non, non, non ! Je suis sérieux. Je me tais, je me concentre cinq minutes, et je saute… Tu peux commencer à y aller si tu veux, je te rejoins là-haut.
- Voilà qui est mieux. Ok… Je pars en premier alors, comme ça j’ouvrirais la voie…
Le caramel ne vint pas contredire l’instinct de chef scout du chapeau et préféra concentrer son énergie sur ce fameux bond.
Quelques minutes plus tard, ils étaient sur le rocher, à regarder vers le phare…
- C’est loin, quand même !
- C’est loin, oui… Il y a la mer tout autour, c’est dangereux, je sais !
- Comment on va faire pour y aller ? Si on se rate, on finit à l’eau !?
- Ca va certainement te faire peur, mais j’ai ma petite idée… Je propose qu’on saute, de rocher en rocher… C’est moins risqué que si on y va en planant…
- On saute de rocher en rocher !!! Et si on se loupe, on se noie, c’est ça ???
- Sinon, j’ai bien mieux : on ne bouge pas, on reste comme deux abrutis à attendre que rien ne bouge… Je suis sûr que cette solution te convient mieux, non ?
- Oh, ça va, ça va… On va les faire, ces putains de bonds ! C’est ma spécialité en plus. Je devrais y arriver…
- On n’arrive à faire les choses que si on le veut vraiment, sinon, ce n’est pas la peine !
- Ok, ok… Il fait un peu de vent quand même…
- Du vent, il y en aura toujours, mon grand. Alors on se bouge et on saute… Allez… Hop, hop… C’est beaucoup plus simple que de planer : tu regardes biens le rocher où tu veux aller et tu bondis, rien de plus facile…
- On va avoir l’air à moitié ridicule, à bondir comme des chèvres de rocher en rocher !
- Si monsieur se croit en représentation, c’est sûr… On s’en fiche d’être ridicules, personne ne nous voit !!! Allez… Je pars en premier, et tu me suis, tu bondis sur les mêmes rochers que moi… On va y aller doucement pour commencer. Fais bien attention au vent !
- Je te suis… Je verrais bien où ça me mène…

vendredi 22 août 2008

épisode trente

Le caramel fut réveillé par un cauchemar, alors que l’aube s’annonçait à peine.

- … Non, non, pas ça !!! Aaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhh, nooooooooooooooooooooooooooonnn !!!

- Oh, caramel, réveille toi !!! Bon sang, mais qu’est ce qui t’arrive ? Ca va pas la tête ! Pourquoi tu hurles ainsi ??? Combien de fois faudra-t-il que je te le répète : on doit rester discret, ne pas attirer l’attention, même si on a l’impression d’être seuls !!!

- … Oh, c’était affreux !

- Du calme, du calme ! Tout va bien, tu n’as rien à craindre… Regarde… Il n’y a personne !

- C’était trop horrible ! Ils étaient là, juste à côté… Là, juste là, tu vois ???

- Je vois surtout du sable à côté, ce qui me paraît normal vu qu’on est sur une plage… Qu’as-tu donc vu de si horrible ???

- Mon dieu, si tu savais… ma sucette, ma pauvre sucette !!!

- Mais pourquoi pleures-tu encore ?! Je t’ai dit qu’il n’y avait personne… Ressaisis toi, que diable ! Tu as fait un mauvais rêve, c’est tout !

- Mais ça semblait tellement vrai, si t’avais vu !!! Ma sucette… Ces barbares de gardes la faisaient bouffer par des chiens ! Et moi, je ne pouvais rien faire, j’étais impuissant, tétanisé, je la regardais se faire dévorer… O… pauvre de moi !

- Bon, il faudrait voir de ne pas délirer totalement… Tu as fait un mauvais rêve, certainement à cause de ce que je t’avais raconté hier, ça arrive. Mais si un simple rêve t’a effrayé, tu peux imaginer ce que j’ai ressenti, moi qui ai assisté vraiment à ce genre de scène…

- Ah oui… Mais j’ai tellement peur pour ma sucette !

- Ca ne sert à rien d’avoir peur pour elle, elle est peut-être plus en sécurité à l’heure qu’il est !

Penser à elle ne nous sauvera pas. Mets la désormais dans un recoin de ta tête, tu y repenseras en temps voulu. Et oublie ce sale rêve, tu as besoin de toute ton énergie… Allez ! Regarde plutôt la lumière qui nous entoure !

- Pffff… ça avait l’air si réel !

- Au moins, tu nous as réveillés tôt, on va pouvoir se préparer dans les meilleures conditions ! Allez, on va grimper sur ce rocher, pour commencer… histoire de visualiser un peu mieux notre phare.


lundi 18 août 2008

épisode vingt-neuf

Il se mit alors à chuchoter, prenant garde que le caramel ne l’entende pas et espérant que le vent emporte son murmure jusqu’à l'Insoumise.

- Je ne t’ai pas oubliée, tu sais. Je ne suis pas Roméo, je ne suis pas ton fiancé, malheureusement. Je vais quand même essayer de t’aider, de nous aider. Tant pis, après tout, si mon histoire avec toi est impossible. Je ne peux t’en vouloir. Je ne peux que te remercier d’exister… si tu existes encore… O, ma pauvre, que t’ont fait tes semblables ?

Le chapeau interrompit son soliloque. Il n’en pouvait plus, c’était trop douloureux de parler, comme ça, dans le vide, alors qu’il s’adressait peut-être à un fantôme.

De nouvelles larmes jaillirent. Mais il ne s’agissait plus de tristesse: il s’agissait de colère, de haine pure envers ces sales humains qui devenaient fous. Des larmes de rage, comme jamais il n'en avait versé. Ces salauds avaient tout saccagé, il n’avait plus assez de mots pour le dire.

Il resta donc un moment, seul avec sa haine, sur le haut d’un rocher, hypnotisé par le rythme monotone de la lueur pourpre. Puis il redescendit, il était déjà trop tard vu la journée qui les attendait. Il se posa de nouveau près du caramel, se colla à moitié contre le rocher. La chaleur diffuse de la pierre apaisa ses peurs, il put trouver un sommeil à peu près paisible.

Rien ne frémissait sur cette plage déserte, si ce n'était le vent. Les vagues. Et, peut-être, dans un phare, une fille attendait que quelque chose bouge, sans trop savoir quoi.

Une nuit trop tranquille, la spécialité de Virtuaworld…

Peut-être aussi que, quelque part, un peu plus loin, un vieux matelas finissait sa vie comme il l’entendait...

lundi 11 août 2008

épisode vingt-huit

- Et… On ne risque rien ?

- Plus personne ne rôde par ici, le matelas est parti, je crois bien que nous sommes seuls. De plus nous sommes cachés par les rochers. Ecoute le bruit des vagues, ça te bercera…

- Mmmouhais… Quand même, ça craint un peu, non ?

- Si monsieur voit un hôtel dans les parages, on y va! Mais il me semble que nous sommes au meilleur endroit.

- Ouhais, bon, on va essayer de dormir. Après tous ces événements, je suis un peu nase…

- Ah, tu vois ! Tiens, mets toi là, écoute les vagues!

Le caramel s’abrita du mieux qu’il put, le chapeau vint se poser à ses côtés. Les vagues chantaient dans ce silence désertique, la lune pleine veillait sur eux.

- Tout n’est pas perdu…

- Comment ???

- Rien, rien, caramel… Bonne nuit à toi !

- Mmmh… Tu me réveilles si t’entends quelque chose de suspect.

- Ne t’inquiète pas, dors tranquille, je te réveille à la moindre alerte!

- Merci… Bonne nuit !

Le caramel s’endormit aussitôt, du sommeil lourd que seule la jeunesse permet. Le chapeau semblait somnoler, mais frémissait imperceptiblement. Il attendit quelques instants d’être sûr du sommeil de son compagnon. Puis il se déplaça doucement, bondit sur un rocher pour être surélevé, afin d'apercevoir le phare.

Sa lumière rouge tournait régulièrement, comme une alerte silencieuse et rythmée. Comme un appel pour aller sauver la fille. Une fois sur le rocher, le chapeau se dressa encore et se mit à la verticale, pour mieux voir. Il tenait « debout » malgré la légère bise qui errait par là.

En voyant ce phare, il sentit son âme frémir. Il sentait au fond de lui que la fille n’était pas morte, il le savait. Il appréhendait de la revoir: elle lui rappelait trop sa faiblesse, ses rêves d’objet stupide.

dimanche 10 août 2008

épisode vingt-sept

- Je me dis que peut-être on peut aider cette fille à retrouver de l’énergie !

- … Et faire exploser l’Omphalôn ?! Trop bon ! Mais on va détruire tous les humains aussi !

- Du calme, du calme… D’abord il y a peu de chance qu’on parvienne à le détruire, en imaginant qu’elle soit encore en vie. Ensuite, la destruction de l’Omphalôn n’entraînerait pas la mort de tous les humains. Seulement ceux qui sont déjà perdus dans leur vie virtuelle, ils sont nombreux, c’est vrai… Mais les autres, ceux qui sont encore chez eux, à attendre leur transfert sur Virtuaworld, ceux-là on peut les sauver. C’est pourquoi il faut nous dépêcher. Si nous attendons trop ils termineront les derniers transferts…

-C’est ça ton plan ???

- C’est tout ce que j’ai trouvé en tout cas, si tu as mieux, tu me dis, on avisera. Mais le temps nous est compté mon ami !

- Mais on a une chance sur un milliard de réussir un coup pareil !!!

- Eh bien, tentons la, nous n’avons rien d’autre à faire…

- Pffff… T’es sûr que c’est faisable ton truc ?

- Je n’en sais rien… Je sais juste que cette fille en est capable, si elle vit encore bien sûr !

- Ouhais… Donc on part en mission pour aller trouver de l’aide. Et cette aide est peut-être un cadavre, ça on le sait pas, ce sera la surprise, vraiment c’est une aventure merveilleuse!

- Ne fais pas d’humour noir, s’il te plaît. L’heure est plus grave que tu ne le crois !

- Je sais, je rigole ! J’espère pour nous qu’elle y sera… Et puis, pour entrer dans le phare, comment on va faire ???

- On n’y est pas encore, on se posera les bonnes questions en temps voulu… Il se fait tard, une longue journée nous attend. Il faut qu’on soit au phare demain soir.

- Mais c’est vachement loin ! On n'y sera jamais !!!

- On verra bien… Ne gaspille pas ton énergie en attendant. Une bonne nuit auprès des rochers nous réconfortera. Ils vont nous transmettre leur force.