lundi 6 avril 2009

Episode soixante-deux

Le caramel, satisfait de son petit effet, fit un bond vers l’Insoumise et se tourna vers elle.

Les minces soupirs du sommeil de Cléophée accompagnaient le ronronnement du félin. Dans un autre contexte ils auraient tous trouvé que l’ambiance était particulièrement agréable. L’heure était à la réflexion, au recueillement, à tous ces moments d’intense méditation que l’homme se croyait le seul capable d’atteindre. Ils réfléchissaient tous tellement, avec tant de foi, tant de détresse, qu’une suave chaleur s’installa dans la pièce.

L’Insoumise avait l’air de bien dormir. Elle ne bougeait pas, respirait régulièrement. Ses cils esquissaient de légers soubresauts. Elle rêvait. Pour une fois elle rêvait, elle ne cauchemardait pas. Un spectateur en aurait eu la certitude en voyant, de temps à autres, le coin de ces lèvres pâles et presque mortes se relever. Elle souriait, troublante cicatrice au milieu d’un visage désenchanté. Peut-être rêvait-elle de bonheur…

Quel calme concentré régnait dans ce phare ! Les objets réfléchissaient comme ils ne l’avaient jamais fait, jamais ils n’avaient autant voulu quelque chose. Jamais leur petite âme d’objet, si fragile, si improbable (si déçue par les hommes) n’avait cherché le salut d’un humain.

Le caramel ne pensait plus à sa sucette, le chat ne pensait plus au lointain goût du crabe. Ils ne pensaient tous qu’à la solution, si solution il y avait.

L’Insoumise, bien paisible dans son sommeil, était loin de se douter que ça chauffait autant dans leurs âmes… Ou bien du fond de son sommeil elle s’en doutait effectivement, pénétrée elle aussi par cette chaleur languissante, souriant de sentir autant d’esprits s’agiter sur son sort.


Que pouvaient ces objets, pour sauver une ancienne humaine que plus rien ne sauvait ? Pouvaient ils vraiment prétendre la rendre plus heureuse, la faire redevenir humaine, au sens le plus noble que pouvait encore avoir ce terme ?

Seules les vagues, clamant leur chant écumeux au dehors, devaient le savoir…

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